Par les doigts de ma mère
Qui berçait son enfant
Par les doigts de mon père
Sur un clavier branlant
Par Toutatis
Par Jupiter
Par Bouddha, Vishnou
Par la Terre
Je suis ici, maintenant, vivant
D’une flèche tombée du ciel
Ou d’un clash céleste
D’un choc émotionnel
D’une chance manifeste
D’un baiser éphémère
Comme la caresse du vent
D’un esprit, d’un éclair
Emergeant du néant,
Je suis ici, maintenant, vivant
Comme un enfant assis
Sur le bord du trottoir
La tête entre les mains
Secoué par le cafard
Comme un paquebot coulé
Vomissant les épaves
Comme la bouche d’un volcan
Crachant ses flots de lave
Je suis là, aujourd’hui, vivant
Par le poing dans la gueule
Le baiser sur la bouche
Par la foi qui soulève
Et le doute qui me couche
Je suis là, maintenant
Fendu, tremblant, troublé
Comme un grand arbre foudroyé
Mais vivant
Par le tout premier cri
Et le dernier soupir
De celui qui va naître
De celle qui va mourir
Par la parole donnée
Par le geste reçu
Je suis là aujourd’hui
Orphelin, seul et nu
Mais je là vivant
Jusqu’à ce que mon esprit
Et mon corps
N’en puissent plus.
Jacques Higelin, 2008, « Flâner entre les intervalles »
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